Avis relatif au renforcement de l’organisation, du contrôle et de la recherche en radioprotection et sûreté nucléaire

Publié le 5 avril 2023

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Avis relatif au renforcement de l’organisation, du contrôle et de la recherche en radioprotection et sûreté nucléaire, délibéré et adopté le 29 mars 2023 en réunion plénière

La Commission nationale de déontologie et des alertes en matière de santé publique et d’environnement (cnDAspe) a été saisie (le texte de la saisine figure dans l’annexe A) par M. Daniel Salmon, sénateur d’Ille-et-Vilaine, en vertu de l’article 4 de la loi n° 2013-316 du 16 avril 2013 relative à l’indépendance de l’expertise en matière de santé et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte, « s’agissant de l’annonce faite par le ministère de la Transition énergétique, le 9 février 2023, concernant la fusion des organismes de contrôle et d’expertise nucléaires », en l’occurrence le projet de dévolution à l’ASN des fonctions exercées par l’IRSN.
Plus précisément, le requérant souhaite que la cnDAspe « se prononce en émettant des recommandations sur les risques de ce projet de fusion pour l’expertise scientifique et technique dans le secteur nucléaire ».

On rappellera que l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN)(1) est une autorité administrative indépendante chargée du contrôle des activités nucléaires civiles en France, créée par la loi. Elle assure, au nom de l’État, le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour protéger les personnes et l’environnement.

Ses missions sont plurielles : contribuer à l’élaboration de la réglementation ; instruire l’ensemble des demandes d’autorisation individuelles des installations nucléaires, à l’exception des autorisations majeures des installations nucléaires de base, ainsi que l’instruction des autorisations prévues par le code de la santé publique pour le nucléaire de proximité ; vérifier le respect des règles et des prescriptions auxquelles sont soumises les installations et activités entrant dans son champ de compétence, en disposant de pouvoirs de coercition et de sanction gradués ; rendre compte de son activité auprès du Parlement, des parties prenantes et du public.

La politique générale de l’ASN est définie par le collège de cinq commissaires dont le président de l’autorité (trois désignés par le Président de la République ; un par le Président du Sénat ; un par le Président de l’Assemblée nationale), exerçant leur mandat à temps plein pendant six ans, non renouvelable et non révocable.

Pour prendre ses décisions, l’ASN s’appuie sur des expertises techniques extérieures, notamment celles de l’IRSN. L’ASN sollicite également les avis et recommandations de huit groupes permanents d’experts placés auprès de l’autorité(2) , dont l’activité s’inscrit dans la « mission expertise et animation ».

Le respect des règles déontologiques est indispensable pour garantir la qualité des expertises et maintenir une relation de confiance avec les publics. Pour garantir l’indépendance et prévenir les conflits d’intérêts, l’ASN s’appuie sur l’obligation pour les responsables (ainsi que pour certains experts) de remplir des déclarations d’intérêts et a mis en place des règles de gestion des liens et de prévention des conflits d’intérêts, retranscrites notamment dans la charte de déontologie annexée au règlement intérieur(3) . Un référent déontologue(4) auprès de l’ASN est nommé par le président de l’ASN.

L’IRSN est un établissement public de l’État à caractère industriel et commercial qui exerce, à l’exclusion de toute responsabilité d’exploitant nucléaire, des missions d’expertise et de recherche dans le domaine de la sécurité nucléaire définie à l’article L. 591-1 du code de l’environnement(5) . Plus précisément, il a pour mission d’assurer des missions d’expertise et de recherche dans les domaines de la sûreté nucléaire, la sûreté des transports de matières radioactives et fissiles, la protection de l’homme et de l’environnement contre les rayonnements ionisants, la protection et le contrôle des matières nucléaires et la protection des installations nucléaires et des transports de matières radioactives et fissiles contre les actes de malveillance. Il est placé sous la tutelle des ministres chargés de l’environnement, de la défense, de l’énergie, de la recherche et de la santé.

Son Conseil d’administration délibère notamment sur les conditions générales d’organisation et de fonctionnement, la stratégie et les programmes de l’institut. La direction générale est composée du directeur général, de quatre directeurs généraux adjoints en charge respectivement des missions relevant de la Défense, du pôle patrimoine et territoires, de la sûreté nucléaire et de la santé et de l’environnement, ainsi que de différents directeurs délégués. Le Comité d’orientation des recherches en sûreté nucléaire et en radioprotection est une instance consultative placée auprès du Conseil d’administration qui développe une approche globale de l’orientation de la recherche. Le Conseil scientifique de l’IRSN donne un avis sur les programmes de recherche et évalue leurs résultats. Par ailleurs, le Comité ouverture et impulsion du dialogue avec la société civile sur l’expertise (ODISCÉ) favorise les interactions sciences-société autour de l’expertise des risques nucléaires et radiologiques(6).

Les priorités en matière de recherche s’organisent autour de quatre axes : la santé environnementale ; la lutte contre le cancer ; le nucléaire face aux enjeux de la transition énergétique ; la réponse aux crises et aux menaces nucléaires, radiologiques, biologiques, chimiques.

Le rapport d’évaluation de l’IRSN établi par le Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres), en date du 7 février 2023, indique que « l’IRSN assume au meilleur niveau ses missions en liaison avec l’État dans un secteur stratégique pour la France et dans un contexte géopolitique en mutation. Son modèle couple expertise(7) et recherche, ce qui lui a permis d’acquérir des compétences reconnues aux niveaux français, européen et international. Pour être performant, ce modèle s’appuie sur une forte composante scientifique et technique qui doit rester à la hauteur des enjeux des applications nucléaires, qu’elles relèvent d’activités industrielles, de santé, de défense ou de recherche. »

Les activités d’expertise de l’IRSN en appui de l’ASN représentent 25 % de l’ensemble de ses activités(8) . Les 75 % restants des activités de l’institut consistent à répondre aux saisines et demandes d’expertises présentées par de nombreuses autorités administratives et ministérielles, mais aussi par le secteur de la Défense nationale et par divers acteurs privés commerciaux.

L’activité d’expertise de l’IRSN couvre ainsi un large spectre de thématiques et répond aux sollicitations d’interlocuteurs issus de secteurs très différents : secteur de la santé, secteur commercial, secteur de la Défense nationale, société civile, animations de programmes d’enseignement et de recherche nationaux et européens, collaborations scientifiques de haut niveau recherche industrielle et travaux d’expertise et de recherche à l’échelle internationale. En particulier, l’institut conduit un dialogue permanent avec l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (ANCCLI), notamment en co-organisant des séminaires et en produisant des ressources visant à outiller les riverains des installations nucléaires et le grand public afin de mieux appréhender les risques.

En matière de déontologie, l’IRSN dispose d’une commission d’éthique et de déontologie, placée auprès du Conseil d’administration, composée de membres extérieurs à l’institut, reconnus et expérimentés sur l’éthique et la déontologie dans le domaine de la gestion des risques et en charge notamment de la rédaction des chartes de déontologie et du suivi de leur application. Une charte d’éthique et de déontologie a été produite en regard des différentes activités de l’établissement et révisée en décembre 2022(9) . La direction des risques et de la performance promeut la mise en œuvre des bonnes pratiques relatives au respect des principes déontologiques et analyse les déclarations de liens d’intérêts produites par les responsables et les experts(10) . Au sein du Contrat d’objectif et de performance 2019-2023, l’IRSN a inscrit l’objectif 36 : mettre à jour les référentiels utilisés pour répondre aux exigences éthiques et déontologiques. L’IRSN ne dispose pas, à ce jour, de déontologue.

Le fonctionnement entre l’ASN et l’IRSN est régi par une convention pluriannuelle déclinée en protocoles annuels d’application. Par ailleurs, les deux établissements sont notamment membres de deux instances : le Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN), instance indépendante et pluraliste où siègent tous les acteurs du monde du nucléaire avec pour mission de garantir et de promouvoir la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire ; le Comité d’animation du système d’agences qui réunit les responsables de neuf agences, en application de l’article R. 1411-58-1 du code de la santé publique, et présidé par le directeur général de la santé.

I- La déontologie de l’expertise publique est au cœur des missions de la cnDAspe

La cnDAspe a été instituée avec pour mission de « veiller aux règles déontologiques s’appliquant à l’expertise scientifique et technique et aux procédures d’enregistrement des alertes en matière de santé publique et d’environnement » (art. 2 de la loi susmentionnée consolidée). À cette fin, elle émet « des recommandations générales sur les principes déontologiques propres à l’expertise scientifique et technique dans les domaines de la santé et de l’environnement et procède à leur diffusion », ainsi que « des recommandations concernant les dispositifs de dialogue entre les organismes scientifiques et la société civile sur les procédures d’expertise scientifique et les règles de déontologie qui s’y rapportent. » Le rapport annuel de la commission comporte, en tant que de besoin, des recommandations sur les réformes qu’il conviendrait d’engager pour améliorer le fonctionnement de l’expertise scientifique et technique.

La commission peut se saisir d’office, ou être saisie par certaines personnes, en particulier les parlementaires (art 4 de la loi).

Ainsi qu’il a été dit, le sénateur auteur de la saisine demande à la Commission d’émettre des recommandations sur les risques du projet de fusion ASN-IRSN pour l’expertise scientifique et technique dans le secteur nucléaire. On notera que l’IRSN fait partie des établissements suivis par la commission, dont la liste est fixée par le décret n° 2014-1628 du 26 décembre 2014. La commission est consultée sur leur code de déontologie, a accès au registre des alertes et est destinataire du rapport annuel de leur comité de déontologie.

Il ne revient pas à la cnDAspe de s’exprimer sur l’organisation des institutions chargées de proposer la réglementation et d’assurer le contrôle des opérateurs, de produire l’expertise et de conduire la recherche en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection, comme dans tout autre domaine.

En revanche, la question de l’incidence des différents types d’organisation sur la mise en œuvre des règles déontologiques applicables à l’expertise scientifique, et la définition des conditions à respecter pour assurer leur respect, s’agissant qui plus est d’un établissement qu’elle est chargée plus particulièrement de suivre sur le plan déontologique, relève des compétences de la Commission.

Les questions posées à la cnDAspe dans la saisine, ainsi que les spécificités des deux établissements, rappelées ci-dessus, soulignent que leur interaction principale porte sur l’activité d’expertise. Il appartient donc à la cnDAspe de s’interroger notamment sur le respect des principes déontologiques afférents à cette activité et à son évolution dans l’éventualité d’une organisation différente de l’ASN et de l’IRSN.

Au préalable, on rappellera les principes déontologiques qui prévalent dans la conduite d’expertises, comme décrits plus largement dans l’annexe C.

L’expertise(11) , selon la norme NF X 50-110, est « un ensemble d’activités ayant pour objet de fournir à un commanditaire, en réponse à la question posée, une interprétation, un avis ou une recommandation aussi objectivement fondés que possible, élaborés à partir des connaissances disponibles et de démonstrations, accompagnées d’un jugement professionnel ».

Les entités publiques ayant pour mission de réaliser des expertises scientifiques ou techniques en appui à la prise de décision par les autorités en charge de la gestion du risque doivent être en capacité de fixer librement leurs objectifs scientifiques et de choisir les méthodes de travail appropriées. L’impartialité et l’excellence scientifique de leurs travaux conditionnent la pertinence et la qualité de l’appui apporté. Cette indépendance entretient un esprit critique qui permet notamment de déceler des problèmes à l’état de signaux faibles. Cette indépendance doit être consolidée par une action résolue pour prévenir les situations de conflits d’intérêts. En effet, des liens d’intérêts mal gérés affectent l’impartialité de l’expertise, et donc sa qualité et sa crédibilité.

Par ailleurs, la pratique de l’expertise exige l’entretien continu d’un haut niveau de compétences scientifiques et techniques, d’autant que les connaissances correspondantes évoluent rapidement. Aussi, l’articulation entre la fonction d’expertise scientifique et les activités de recherche que pratiquent ces experts ou auxquelles ils ont un accès proche, est essentielle. Enfin, pour la construction et l’entretien de la confiance de la société dans la fiabilité et l’impartialité de l’expertise, l’exigence de transparence vise à garantir le droit du public à une information fiable et compréhensible, et concrétiser la mission d’intérêt général que représente l’activité d’expertise.

La cnDAspe a publié plusieurs avis dans ce domaine consultables sur son site(12) .

II- L’organisation du travail de la cnDAspe pour répondre à la saisine

La cnDAspe, dans un délai contraint, a constitué un groupe d’experts, appelé « formation spécifique », chargé de conduire la réflexion et de préparer sa réponse sous la forme d’un avis (annexe B). Elle s’est assurée à cet effet de l’absence de conflit d’intérêts des membres de ce groupe sur l’objet de la saisine et a veillé à gérer les liens d’intérêts de ses membres pendant toute l’instruction de cette saisine conformément à ses propres procédures (voir note 12 pour l’accès aux documents correspondants).

Ce groupe d’experts a défini le cadre déontologique de la saisine en s’appuyant sur les références réglementaires, normatives et différentes sources d’information exposées notamment au point III, ainsi que les documents (annexe D) relatifs à l’organisation de la sûreté nucléaire produits par l’Agence internationale de l’énergie atomique et la Directive 2014/87/EURATOM du 8 juillet 2014 établissant un cadre communautaire pour la sûreté nucléaire des installations nucléaires.

Ce référentiel a été décliné à travers les questions posées à toutes les personnalités auditionnées qui leur ont été transmises avec la lettre d’invitation (annexe E).

Vingt-et-une personnalités ont été sollicitées pour des auditions dont dix-sept d’entre elles ont accepté l’invitation et ont été auditionnées entre le 13 et le 23 mars 2023 (annexe F).

Toutefois, la cnDAspe regrette que madame la ministre de la Transition énergétique, ainsi que les responsables de l’ASN n’aient pas donné suite à sa sollicitation(30).

III- Les considérants ayant présidé à l’analyse du sujet par la cnDAspe

  • Les éléments essentiels de la déontologie de l’expertise publique sur lesquels se fonde la cnDAspe dans l’exercice de sa mission (annexe C).
  • Les documents relatifs à l’organisation de la sûreté nucléaire produits par l’Agence Internationale de l’énergie atomique (AIEA), et notamment (Annexes D-1 et D-2) :
    • Prescriptions générales de sûreté. Partie 1 : Cadre gouvernemental, législatif et réglementaire de la sûreté (2016), dans sa « Prescription 20 : Liaison avec des organes consultatifs et des organismes d’appui » (voir en annexe D-1 les éléments de ce document en lien direct avec l’objet de la saisine).
    • AIEA TECDOC 1835 (2018). Organismes d’appui technique et scientifique aux fonctions réglementaires, notamment son chapitre 3 : Caractéristiques et gestion de l’appui technique et scientifique (conditions d’efficacité de l’appui technique et scientifique), sous-section 3.1.3. Indépendance (voir en annexe D-2 les éléments de ce document en lien direct avec l’objet de la saisine).
  • La Directive 2014/87/EURATOM du 8 Juillet 2014 modifiant la directive 2009/71/Euratom établissant un cadre communautaire pour la sûreté nucléaire des installations nucléaires qui, en son considérant 8 fait explicitement référence à la partie 1 des « prescriptions générales de sûreté » de l’AIEA.
  • Les rapports d’évaluation de l’IRSN par le Hcéres, en 2018 et 2023.
  • Les informations apportées en réponse aux questions posées par les personnalités auditionnées entre le 13 et le 23 mars 2023.
  • La part importante des activités de l’IRSN concernant d’autres acteurs que l’ASN (notamment des départements ministériels, dont la Défense nationale, des opérateurs publics et privés du domaine nucléaire, des organismes représentant les riverains et le public…).
  • L’analyse faite par le Conseil scientifique de l’Anses des facteurs influençant « La crédibilité de l’expertise », à partir du retour d’expérience sur les effets de l’intégration au sein de cette agence d’expertise, à partir de 2015, d’une mission de gestion des produits phytosanitaires, avec la charge de la délivrance de leurs Autorisations de Mise sur le Marché (AMM) par délégation du Ministère de l’agriculture.
  • D’autres sources d’information pertinentes (annexe G).

IV- Sur la base de ces informations et de son analyse des enjeux déontologiques, la cnDAspe souligne que :

1) Une expertise d’excellence requiert une forte articulation avec la recherche.

La recherche et l’expertise constituent deux éléments indissociables. L’expertise de l’IRSN se nourrit des travaux de recherche menés en son sein et dans les communautés scientifiques pertinentes. La compétence des experts est assurée et maintenue par leur implication dans la recherche. Inversement, les demandes d’expertise reçues de l’ASN ou des ministères aident l’Institut à maintenir une recherche pertinente, souvent pluridisciplinaire, pour la mise en œuvre de la sûreté en conditions réelles. Il est donc important que la recherche et l’expertise soient conservées au sein du même établissement, qu’elles soient correctement articulées l’une avec l’autre et que les spécificités et exigences propres à chacune d’elles soient prises en compte.

Même finalisées – orientées vers la sûreté nucléaire et la radioprotection – les recherches menées à l’IRSN doivent bénéficier des conditions nécessaires à toute recherche de qualité, notamment en termes de liberté académique, d’intégrité scientifique, de transparence et de gestion des conflits d’intérêt, de règles de signature des publications scientifiques.

L’évolution des technologies et des connaissances scientifiques en matière de nucléaire est rapide. Cela appelle une solide insertion de la fonction de recherche de la future entité au sein de l’écosystème de l’enseignement supérieur et de la recherche national et communautaire (évaluation périodique par le Hcéres, accueil de doctorants et de post-doctorants …) afin de promouvoir son attractivité pour les meilleurs chercheurs et le plus haut niveau d’excellence.

L’expertise en sûreté nucléaire et radioprotection doit pouvoir s’appuyer sur les résultats de la recherche la plus avancée. La qualité de l’expertise réalisée par l’IRSN est largement reconnue. Celle-ci est notamment renforcée par le fait qu’existe une concertation en amont sur la mission et le calendrier de l’expertise entre le commanditaire et l’opérateur d’expertise. De même, cette expertise est d’autant plus pertinente qu’elle s’appuie sur et prend en compte l’expertise présente au sein de la société civile représentée par les parties prenantes (ANCCLI, associations …). La crédibilité de l’expertise de l’IRSN est assurée par plusieurs facteurs supplémentaires, qu’il conviendra de conserver quelle que soit la configuration institutionnelle future : la transparence des avis techniques, leur publication immédiate sans attendre la décision qu’ils viennent éclairer, leur caractère collectif.

La qualité de l’expertise bénéficie aussi de l’éclairage qu’apporte la commission d’éthique et de déontologie de l’IRSN, qui contribue à diffuser une culture déontologique au sein de l’établissement, parmi les agents et la gouvernance.

2) L’indépendance de l’expertise scientifique et technique en appui à la gestion des risques doit s’appuyer sur un statut juridique solide.

La mise en œuvre de la déontologie de l’expertise et de la recherche ne se conçoit pas indépendamment du statut juridique des principaux acteurs impliqués. Alors que l’ASN est une autorité administrative indépendante, l’IRSN constitue un établissement public industriel et commercial (EPIC). Sur le plan juridique, ces deux situations contrastent fortement. Alors que les membres du collège de l’ASN sont irrévocables(13) , il peut être mis fin au mandat du directeur général de l’IRSN par décret. Le choix fait en 2006 d’établir l’IRSN sous forme d’un EPIC(14) ne semble cependant pas avoir affecté son indépendance.

Le scenario privilégié par le gouvernement consiste à intégrer dans l’ASN les missions d’appui technique et d’expertise actuellement assumées par l’IRSN Cette hypothèse revient à renoncer au système dual qui prévaut depuis 2006, consistant à confier à deux entités distinctes, d’une part, la recherche et l’expertise et, d’autre part, la gestion des risques. La cnDAspe relève que cette situation expose à ce que les fonctions de gestion confiées à l’entité pèsent sur l’expertise et la recherche, au risque d’en affecter la qualité, et in fine de dégrader la sûreté. Pour cette raison, la cnDAspe considère que la déontologie de l’expertise exige une très ferme séparation de ces différentes fonctions.

La vigueur de cette séparation est susceptible de degrés. A minima, établir au sein d’une organisation intégrée, une direction fonctionnelle chargée de l’expertise et de la recherche, distincte des autres directions de l’établissement serait nécessaire.

L’hypothèse d’une telle direction fonctionnelle interne présente cependant des limites, tant il est à craindre que la culture commune qui se développerait au sein d’un établissement unique puisse, malgré les vertus que l’on peut lui reconnaitre par ailleurs, diffuser jusqu’aux agents chargés de la recherche et de l’expertise les contraintes de gestion pesant sur l’établissement. En outre, une telle direction risquerait de ne pas disposer des ressources lui permettant de conduire, en son nom propre, les actions de communication et de dialogue avec la société civile, qui aurait alors du mal à faire la part, au sein de l’autorité intégrée, entre ce qui relève de l’expertise et ce qui relève de la mise en œuvre de la politique de gestion des risques.

D’autres configurations institutionnelles pourraient assurer l’autonomie des fonctions de recherche et d’expertise. Les exemples abondent en effet d’entités autonomes établies, selon des modalités diverses, au sein d’autorités indépendantes ou de services d’inspection (par ex. le Comité de règlement des différends et des sanctions au sein de la Commission de régulation de l’énergie(15) , la Commission des sanctions au sein de l’Autorité des marchés financiers(16) , l’ANRS au sein de l’Inserm(17) , l’Agence ITER-France au sein du CEA(18) , l’Autorité environnementale au sein de l’IGEDD(19) , l’Agence nationale du médicament vétérinaire au sein de l’Anses(20) ). Cependant, ces entités autonomes ne disposent en général pas de la personnalité morale, ce qui peut présenter des inconvénients au vu des activités qu’exerce aujourd’hui l’IRSN, notamment ses activités de nature commerciale.

Aussi, il est souhaitable de conférer la personnalité morale à l’entité chargée de la recherche et de l’expertise. Pour cela, la cnDAspe estime qu’il conviendrait de réfléchir à d’autres solutions novatrices, comme par exemple, conférer à l’IRSN la qualité d’autorité publique indépendante (API)(21) ou un statut s’en inspirant.

Dans le cadre d’une organisation intégrée, l’emboitement d’une API au sein d’une AAI constituerait un schéma organisationnel novateur, propre à organiser l’indépendance des activités de recherche et d’expertise ; à ce titre, il mérite pleine considération.

3) La transparence et l’ouverture à la société civile sont des conditions de la confiance de la société dans les institutions en charge de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

En matière de sûreté et de risques pour la santé ou pour l’environnement en règle générale, et en particulier lorsque sont en jeu des rayonnements ionisants, la société civile exprime une forte demande d’ouverture de la part des organismes publics impliqués(22) . Les principales attentes incluent :

  • Un engagement de transparence, afin de pouvoir exercer un rôle de vigilance citoyenne contribuant à la démarche de maîtrise des risques. Cette transparence favorise la « confiance dans ce qui se montre digne de confiance »(23) ;
  • Un accès dans des termes compréhensibles aux connaissances, et un besoin d’acquisition de compétences, afin de pouvoir mieux s’approprier les sujets à forts enjeux citoyens ;
  • Une participation active aux évaluations des risques, contribuant à éclairer aux mieux les décideurs publics.

En matière d’ouverture à la société et de dialogue avec les différentes parties prenantes impliquées, l’IRSN est reconnu pour sa politique volontariste, développée depuis environ 20 ans, et qui est inscrite dans son contrat d’objectifs et de performance(24) .

L’ASN s’est également fixée un engagement en matière de droit à l’information, de participation du public et de transparence(25) .

4) Des tensions entre la fonction d’expertise et la fonction de gestion du risque résultent naturellement de leurs missions propres et du contexte dans lequel elles s’inscrivent.

Ces tensions concernent le calendrier très contraint de la décision, et celui de la procédure balisée de l’expertise collective ; elles concernent aussi les attentes de lisibilité au long cours et de décisions claires des opérateurs visés, et le caractère évolutif et parfois incertain des connaissances sur lesquelles se fonde l’expertise. Ce constat vaut dans le domaine du nucléaire comme dans maints autres champs des politiques publiques, particulièrement lorsque sont en jeu des risques pour la santé ou pour l’environnement.

Les tensions entre ces points de vue apparaissent donc inévitables jusqu’à un certain point. Pour les atténuer et pour éclairer au mieux les décisions à prendre par l’autorité chargée de la gestion du risque, elles exigent l’instauration de règles explicites et d’un cadre contractuel solide garantissant à la fois, l’indépendance des organismes d’appui technique et scientifique, ainsi que cela est prescrit par l’AIEA et le respect par ces organismes de règles de nature à assurer l’exploitabilité de leur avis pour le décisionnaire.

5) Les choix organisationnels et humains ont une incidence sur la déontologie de l’expertise.

Les auditions ont mis en évidence un réel sentiment d’appartenance et de fierté des salariés de l’IRSN à l’égard de leur organisme. La fonction d’« expert public  » donne du sens à leur engagement professionnel.

Les experts et scientifiques de l’IRSN se sentent à l’abri d’éventuelles pressions extérieures et libres d’assurer leur activité dans un cadre déontologique défini et affiché (Charte d’éthique et de déontologie réactualisée 2022, Groupes de travail, collaborations avec l’ANCCLI, Guide des bonnes pratiques, vigilance sur les liens d’intérêt, recours aux avis des groupes permanents d’experts agissant comme des conseils de sages…). Il en découle une adhésion aux objectifs de l’Institut et un esprit d’entreprise bénéfiques à l’efficacité de la structure.

Le projet de fusion des deux instances IRSN/ASN pourrait être contre-productif en matière de ressources humaines, de compétences et de motivations. Cela d’autant plus à un moment où ce marché du travail technique qualifié est en tension (pénurie de compétences spécialisées) et qu’est relancée l’énergie nucléaire. Cette situation pourrait entrainer un départ d’agents de l’IRSN vers des opérateurs externes publics ou privés, privant la recherche et l’expertise en appui à l’ASN de compétences précieuses, avec de possibles conséquences sur la sûreté.

6) Le choix du modèle de gouvernance doit prendre en considération la culture des organisations.

L’AIEA n’impose pas de modèle organisationnel type en matière de gouvernance pour la sûreté du nucléaire.

La France a fait le choix du modèle dual, avec deux instances autonomes et séparées, l’une assurant une expertise à caractère public (IRSN), l’autre la responsabilité de la décision (ASN). En fait de dualité, on pourrait plutôt parler d’organisation tripartite, experts, décideur, operateurs.

Les Etats-Unis d’Amérique, où les exploitants sont multiples, ont privilégié un modèle intégré, expertise et décision relevant du même organisme (le National Research Council), l’indépendance des deux entités étant garantie par des formalités internes extrêmement rigoureuses et semble-t-il strictement respectées. Ce modèle est également celui du Royaume -Uni, du Canada et de la Suède.

Il n’y a pas a priori de modèle idéal ni de modèle universel  ; chaque pays a son propre parc, sa propre histoire et sa propre culture des organisations. Il convient donc d’appréhender les organisations globalement et dans leur ensemble. Quel que soit le mode d’organisation retenu, l’AIEA exige cependant le respect du principe d’indépendance de l’expertise et la transparence vis-à-vis de la société civile.

7) Les choix organisationnels et institutionnels ont une incidence sur la confiance accordée à l’expertise.

La communication soutenue, systématique et transparente de l’IRSN sur ses avis et ses processus de décision, ainsi que sa volonté affichée de partager ses connaissances avec les représentants de la société civile participe activement au climat actuel de confiance des Français vis-à-vis de l’activité nucléaire de leur pays.

Une remise en question du statut de l’instance d’expertise et de recherche risque de réactiver la défiance des citoyens à l’égard des pouvoirs publics et de réveiller les soupçons d’ingérence du politique sur le scientifique. L’impartialité de l’expertise et de l’information pourrait être à nouveau contestée et le climat social se dégrader, au moment où l’accélération de la politique nucléaire récemment votée exige un effort accru de transparence et de dialogue.

Par ailleurs, si les crises sanitaires traversées par le pays au cours des 40 dernières années ont affecté la crédibilité de la parole scientifique, elles ont cependant permis l’émergence des principes déontologiques applicables à l’expertise, notamment la nécessité d’une séparation entre l’expertise et la gestion. Si, ainsi que mentionné plus haut, le respect de ce principe peut être compatible avec une organisation intégrée, c’est avec plus de difficultés que lorsque ces missions sont attribuées à des personnes morales différentes. Ainsi, une autre grande agence publique d’expertise française, l’Anses, qui fonctionne sur le modèle d’une organisation intégrée, singulièrement s’agissant des pesticides, fait l’objet de critiques de la part même de ses instances scientifiques, lesquelles soulignent les indéniables difficultés que font naître l’affaiblissement du principe de séparation entre l’expertise et la décision.

8) Il faut tirer les leçons de l’expérience disponible, notamment en France : retour sur le système intégré au sein de l’Anses.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), établissement public à caractère administratif, sous la tutelle des ministères de la santé, de l’environnement, de l’agriculture, du travail et de la consommation, a été créée dans une démarche mettant en œuvre le principe de séparation entre l’évaluation et la gestion des risques, notamment afin de garantir l’indépendance de l’expertise. Cette démarche, s’appuyant notamment sur les recommandations issues du Livre Rouge(26) , s’est concrétisée à la suite de plusieurs crises sanitaires pendant les années 1990 : « vache folle » (encéphalopathie spongiforme bovine), sang contaminé, hormones de croissance, etc.

En 2014(27) , l’Anses s’est vu confier la gestion des pesticides (produits phytopharmaceutiques puis biocides - autorisations, encadrements des usages, retraits, etc.), en complément de l’évaluation préalable des risques associés. Dans ce contexte, afin de respecter au mieux le principe de séparation entre évaluation et gestion des risques, l’Anses a pris des dispositions pour mettre en place une structure et des procédures visant à assurer une séparation fonctionnelle, à défaut de pouvoir assurer une séparation institutionnelle. Le cas de l’Anses peut donc être vu comme un exemple intégré cumulant l’expertise et la gestion. Bien que se trouvant dans un contexte différent, avec un appui au gouvernement pour l’Anses et un appui à une autorité administrative indépendante (ASN) pour l’IRSN, cet exemple peut indirectement éclairer le cas d’une potentielle fusion entre ASN et IRSN et donc un passage d’un système dit dual à un système dit intégré.

Dans ce cadre, différentes instances ont formulé les constats suivants à propos de l’application de ces dispositions :
• Le comité scientifique de l’Anses a souligné(28) que cette organisation contribue à « l’érosion » de la crédibilité de l’Agence, et que la traduction actuelle des avis d’expertise en mesures de gestion manque de transparence. On peut y voir un risque d’assujettissement préoccupant de l’évaluation des produits règlementés aux enjeux décisionnels.

  • Le regroupement de la direction de l’évaluation des produits et de la direction des autorisations de mise sur le marché dans une même direction des produits réglementés nuit à cette lisibilité, car l’ensemble des comités d’évaluation des autres domaines sont rattachés à une direction distincte des sciences de l’expertise ;
  • Cette fusion, non-souhaitée par l’Anses, a dégradé les conditions de travail des agents en charge de l’évaluation des produits concernés, soumis à un accroissement de pressions et de critiques diverses ;
  • Aucune évaluation formelle de l’organisation fusionnée n’a été réalisée après sa mise en place ;
  • Plusieurs parties prenantes et experts participants aux comités de l’Anses ont souligné le manque actuel de visibilité des modalités de séparation entre évaluation et expertise.

V- En conclusion, la cnDAspe formule les recommandations suivantes :

1- La séparation et l’indépendance des fonctions de gestion et d’expertise doivent être garanties.

Une ferme séparation institutionnelle doit être assurée entre les activités de gestion des risques, d’une part, et l’activité de recherche et d’expertise, de l’autre. Plusieurs moyens permettent d’atteindre ce résultat. Les expériences internationales enseignent qu’il existe une grande variété de configurations institutionnelles, qui ne sont pas nécessairement transposables sans précaution d’un pays à l’autre.

Le moyen le plus sûr d’assurer la séparation de la gestion d’avec la recherche et l’expertise en appui à cette fonction de gestion consiste à maintenir ces missions au sein de personnes morales différentes, en renforçant l’indépendance juridique accordée à l’IRSN.

A défaut, et si le choix était fait de transférer à l’ASN les missions actuellement exercées par l’IRSN, il serait nécessaire d’assurer une autonomie fonctionnelle de la recherche et de l’expertise au sein de l’ASN. Une solution novatrice pourrait être de s’inspirer pour l’entité interne reprenant les fonctions de l’IRSN du statut d’autorité publique indépendante.

Une autre possibilité serait d’établir au sein de l’ASN une direction fonctionnelle chargée de l’expertise et de la recherche, distincte des autres directions de l’établissement. La mise en œuvre d’une direction fonctionnelle propre suppose de :

  • Veiller à ce que l’indépendance de cette direction soit établie par voie législative ou réglementaire, et non par le règlement intérieur de l’agence.
  • Confier à son directeur le rang de membre du collège de l’ASN dans les conditions prévues à l’article L. 592-2 du Code de l’environnement et de vice-président de l’agence.
  • Garantir que la direction en charge de la recherche et de l’expertise puisse définir librement ses orientations scientifiques et dispose des moyens et de l’autonomie nécessaires pour conduire par elle-même ses actions de communication au grand public et ses interactions avec la société civile.
  • Organiser au sein de l’agence la formation de tous les personnels à la déontologie de l’expertise.
  • Organiser un canal interne de signalement des manquements à l’indépendance de l’expertise et des manquements à l’intégrité scientifique ; assurer la protection des auteurs de signalements contre toute mesure de rétorsion dans le cadre de la législation en vigueur ; veiller à l’information de tous les agents, fournisseurs et sous-traitants sur leur droit de formuler des signalements par le biais de ce canal interne.
  • Établir au sein de l’agence un comité d’éthique et de déontologie, compétent pour l’ensemble des missions de l’agence.

2- L’excellence de l’expertise publique en radioprotection et sûreté nucléaire doit être consolidée.

  • Veiller à ce que les contours et le calendrier des missions d’expertise soient discutés en amont entre leur commanditaire et l’organisme chargé de les réaliser ; le commanditaire de l’expertise conserve le dernier mot.
  • Assurer la transparence des procédures d’élaboration des avis techniques et rendre publiques les données sur lesquelles ils s’appuient.
  • Veiller à ce que l’expertise soit réalisée collectivement, avec un renouvellement régulier des experts.
  • Rendre publics les rapports d’expertise, immédiatement après leur validation par la structure d’expertise. Les raisons qui pourraient éventuellement justifier un report ou une absence de publication d’un rapport (secret défense, donnée à caractère personnel) doivent être explicitées et les décisions prises au cas par cas doivent être justifiées par rapport à ces références.
  • Veiller à ce que les experts participant à la production d’un rapport d’expertise renseignent une déclaration publique d’intérêt, accessible au public.
  • Veiller à ce que la composition des groupes d’experts reflète une variété de points de vue et de perspectives scientifiques (l’avis n° 2022-3 du Comité de déontologie et de prévention des conflits d’intérêt de l’Anses constitue un exemple de méthodologie).
  • Etablir des règles portant sur le traitement des conflits d’intérêt découlant de la circulation des experts, au cours de leur carrière professionnelle, entre l’exploitant, l’autorité de contrôle et l’entité chargée de la recherche et de l’expertise. Un organisme dédié doit être chargé d’émettre un avis public sur ces situations.

3- Le couplage expertise-recherche doit être préservé.

  • Assurer la liaison de la recherche et de l’expertise, quelle que soit l’organisation retenue.
  • S’appuyer sur une recherche de qualité, respectant le Code de la recherche et la Charte de déontologie des métiers de la recherche.
  • Maintenir l’indépendance de la recherche, qui se traduit par la possibilité de définir et de prioriser une partie significative des sujets de recherche, tout en tenant compte des finalités propres de l’établissement.
  • Etablir des règles claires et connues de tous concernant les cas dans lesquels la publication des résultats de recherche peut faire l’objet d’une restriction de publication (par exemple, en vue du dépôt de brevet).
  • Etablir des règles déontologiques pour la mise en place de partenariats industriels, en particulier lorsque l’activité de ces partenaires est soumise au contrôle de l’ASN.
  • Associer les parties prenantes à la définition des orientations scientifiques et, le cas échéant, au pilotage de projets de recherche.
  • Maintenir le couplage expertise-recherche et le respect des règles déontologiques pour l’ensemble des activités de l’IRSN, y compris celles qui ne sont pas destinées à l’ASN.

4- La transparence et la politique d’ouverture aux parties prenantes et à la société civile doivent être renforcées.

  • Faire un bilan des pratiques en termes de transparence et d’ouverture à la société civile actuellement mises en œuvre par l’IRSN et l’ASN
  • Inscrire les bonnes pratiques de transparence et d’ouverture à la société civile dans les règles de fonctionnement des entités concernées.
  • Veiller non seulement à ce que l’expertise soit effectivement indépendante de la décision, mais aussi à ce que cela soit clairement lisible et compréhensible pour le public et les parties prenantes.

5- Les conséquences des changements opérés en matière de gouvernance de l’organisation, du contrôle et de la recherche en radioprotection et sûreté nucléaire doivent être évaluées.

  • Faire précéder tout changement de l’organisation de la sûreté nucléaire d’une étude d’impact approfondie(29) .
  • Mettre en place un comité de suivi des engagements de déontologie et d’indépendance, incluant des parties prenantes extérieures.
  • Réaliser des audits réguliers sur les aspects de déontologie et d’indépendance, par une structure externe indépendante, dont les rapports seront notamment envoyés à l’OPECST et à la cnDAspe pour avis.

Au vu de l’ensemble des informations réunies, la cnDAspe estime que l’organisation duale actuelle répond aux exigences de déontologie qui s’imposent à l’expertise scientifique et technique (sous réserve des renforcements proposés ci-dessus).

En tout état de cause, tout projet de réforme nécessite une concertation préalable avec toutes les parties prenantes, une évaluation du fonctionnement des entités et la réalisation d’une étude d’impact.

Composition de la formation spécifique

Elisabeth Toutut-Picard, députée honoraire et ancienne membre de la cnDAspe
Présidente de la formation spécifique
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Pierre-Henri Duée, membre de la cnDAspe
Rapporteur pour la cnDAspe
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Guillaume Karr, expert en santé environnementale
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Olivier Leclerc, membre de la cnDAspe
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Soraya Duboc, Conseillère au Conseil économique, social et environnemental CESE. membre de la cnDAspe. Sciences des aliments, réglementation alimentaire.
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Viviane Moquay, membre de la cnDAspe
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(1) [L’ensemble des informations portant sur l’ASN est consultable sur le site de l’autorité (https://www.asn.fr)].
(2) [L’ASN dispose de services centraux organisés par thématiques, ainsi que de onze divisions territoriales qui assurent l’essentiel du contrôle de terrain, contribuent à l’information du public et assistent, dans les situations d’urgence, le préfet de département].
(3) [Une charte de l’expertise externe réalisée à la demande de l’ASN est également annexée au règlement intérieur de l’ASN. Elle concerne en particulier les travaux réalisés par l’IRSN, dans les conditions prévues par l’article L. 592-14 du code de l’environnement ou par les conventions passées entre les deux organismes].
(4) [Il exerce en outre les fonctions de référent « laïcité » et de référent pour les lanceurs d’alerte].
(5) [L’ensemble des informations portant sur l’IRSN est consultable sur le site de l’institut (https://www.irsn.fr)].
(6) [On notera aussi que l’Anses, le BRGM, l’IFREMER, l’INERIS, l’INRAE, l’IRSN, l’Université Gustave Eiffel et Santé publique France ont signé en 2008 une charte de l’ouverture à la société, dernièrement actualisée en 2020].
(7) [L’expertise de l’IRSN est une expertise institutionnelle au sens de la norme NF X 50-110, réalisée par des experts habilités par l’institut et appliquant le processus de réalisation des expertises satisfaisant aux exigences qualité de la norme ISO 9001].
(8) [Audition de Jean-Christophe Niel, Patrice Bueso et Patrice Deschamps par la formation spécifique, le 15 mars 2023].
(9) [Par ailleurs, un guide d’analyse des liens d’intérêts en application de la charte de l’expertise sanitaire a été produit en 2020].
(10) [Courrier en date du 13 janvier 2022 du directeur général de l’IRSN au président de la cnDAspe, à la suite de la publication de la note de synthèse « Diagnostic et partage des bonnes pratiques en matière de déontologie », adoptée le 18 novembre 2021].
(11) [Comme rappelé dans le rapport de Didier Truchet en décembre 2019 : « L’expertise publique », Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, 76 p].
(12) [http://www.alerte-sante-environnement-deontologie.fr Ainsi, l’avis concernant la déontologie des procédures d’expertise au sein des agences de l’Union européenne (janvier 2019), l’avis sur les conditions de confiance des citoyens vis-à-vis du processus d’évaluation du renouvellement de l’autorisation du glyphosate en Europe, l’avis sur l’harmonisation des dispositifs de gestion des liens d’intérêts au sein des autorités d’expertise nationales compétentes en matière d’évaluation des risques et d’autorisation de la mise sur le marché des pesticides au sein de l’Union européenne.].
(13) [Art. 6 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017].
(14) [Art L. 592-45 C. envir].
(15) [Art L. 132-1 C. énergie].
(16) [Art L. 621-2 C. mon. et fin].
(17) Décret n° 83-975 du 10 nov. 1983, art. 10-3].
(18) [Décret n° 2006-752 du 29 juin 2006].
(19) [Art. R. 122-6 C. envir. et décret n° 2022-1165 du 20 août 2022].
(20) Art. L. 5145-1 du code de la santé publique].
(21) [Loi n° 2017-55 du 20 janv. 2017 et Loi organique n° 2017-54 du 20 janv. 2017].
(22) [Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Baromètre IRSN : La perception des risques et de la sécurité par les Français. 2022. [http://barometre.irsn.fr/]->http://barometre.irsn.fr/]].
(23) [Hosking, GA. Trust : A History. Oxford University Press, 2014].
(24) [ Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Contrat d’objectifs et de performance 2019-2023 entre l’État et l’IRSN. 2019].
(25) [Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2021 (2022). Chapitre 05 - L’information des publics].
(26) [National Regulatory Commisson (NRC) - Committee on the institutional means for assessment of risks to public health. Risk assessment in the Federal government : managing the process. The National Academies Press, 1983. https://nap.nationalacademies.org/catalog/366/risk-assessment-in-the-federal-government-managing-the-process].
(27) [Loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt].
(28) [Conseil scientifique de l’Agence de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Avis relatif au rapport du GT « Crédibilité de l’expertise scientifique » issu du Conseil scientifique. 2023].
(29) [À notre connaissance, trois instances au sein de l’IRSN ont exprimé publiquement leur défiance vis-à-vis de l’éventuelle fusion entre l’ASN et l’IRSN : il s’agit de la commission d’éthique et de déontologie, du conseil scientifique et du Comité d’orientation des recherches en sûreté nucléaire et en radioprotection].
(30) [Addendum du 31/03/2023 : La réponse de Mme Agnès Pannier Runacher, ministre de la transition écologique, a été recue le 30/03/2023, après l’adoption en plénière du présent avis lors de la plénière extraordinaire de la cnDAspe du 29/03/2023].

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