Avis sur le signalement de possibles risques liés à l’utilisation de fongicides agissant par inhibition de la succinate déshydrogènase (SDHI)

Publié le 19 novembre 2019

Avis relatif au signalement sur de possibles risques liés aux fongicides agissant par inhibition de la succinate déshydrogènase (SDHI),
délibéré le 24 octobre 2019 en réunion plénière

La cnDAspe a reçu un signalement le 11 avril 2019 d’une équipe de chercheurs, indiquant que leurs travaux avaient mis en évidence des dangers non pris en compte par les procédures d’évaluation des risques appliquées dans le cadre de l’autorisation de mise sur le marché des produits phytosanitaires. Ces dangers concernent une famille de fongicides dits SDHI, c’est-à-dire qui agissent par un mécanisme qui inhibe une enzyme intervenant dans la respiration cellulaire, la succinate déshydrogènase. Ces chercheurs mettaient également en cause la réponse jugée insuffisante de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) lorsqu’ils avaient porté cette découverte à sa connaissance, en 2017. Cette « alerte » a été discutée lors de la session plénière de la cnDAspe du 25 avril 2019.

Conformément à sa mission, la Commission a demandé à l’Anses, autorité compétente en France pour l’instruction des demandes de mise sur le marché européen des produits phytosanitaires, communication des informations dont l’agence disposait sur le sujet, et un état des différents échanges noués avec l’équipe des chercheurs. Dans sa réponse, qui comportait un relevé détaillé de ces échanges, la Direction de l’Anses a souhaité être entendue par la Commission. Lors de la session plénière du 20 juin 2019, la Commission a décidé de recevoir les Directeurs délégués de l’Anses en charge de ce dossier, dans le but de porter une appréciation sur la manière dont le signalement des chercheurs avait été géré par l’autorité compétente. L’échange a eu lieu le 12 septembre 2019, à la suite duquel la cnDAspe a demandé à l’auteur du signalement de lui communiquer tout document scientifique de nature à accréditer l’hypothèse avancée par l’équipe de chercheurs au nom de laquelle il avait engagé la démarche. En réponse, celui-ci lui a communiqué un projet d’article soumis par cette équipe pour publication dans une revue scientifique internationale. Non compétente pour juger sur le fond la validité scientifique de ces travaux, la Commission a adressé ce projet d’article, sous le sceau de la confidentialité, à deux experts toxicologues membres du Comité de la Prévention et de la Précaution (CPP), son comité spécialisé, en leur demandant un avis sur la force de conviction des résultats présentés.

Sur la base de l’ensemble de ces informations, la cnDAspe émet l’avis suivant :

  • Les données scientifiques présentées par l’équipe de chercheurs sur les dangers des fongicides SDHI sont de qualité et posent un doute sérieux sur des dangers qui ne sont pas actuellement pris en compte dans les procédures de toxicologie appliquées selon la réglementation européenne concernant la mise sur le marché des produits phytosanitaires. Des incertitudes substantielles demeurent néanmoins sur les risques qui seraient induits chez l’homme lors de l’exposition à cette famille de fongicides, qui appellent la poursuite des recherches et donc des financements dédiés. Cette situation est constitutive d’une alerte.
  • L’Anses a traité le signalement qui lui a été communiqué par l’équipe de chercheurs de manière réactive et approfondie, notamment en informant les autorités compétentes européennes, américaines et les agences correspondantes dans les Etats-membres de l’Union, et en engageant des financements importants pour améliorer les connaissances sur ces dangers identifiés. La cnDAspe invite l’Anses à poursuivre dans ce sens et lui adresse les éléments d’information recueillis à l’occasion de l’instruction de ce signalement.
  • Les ministres en charge de l’environnement, de la santé, de la recherche, de l’agriculture, des sports, compétents à différents titres sur le sujet, sont saisis de cette alerte.
  • Afin que les autorités politiques puissent disposer d’un cadre solidement argumenté leur permettant, s’ils en décident ainsi lorsque les données scientifiques consolidées seront disponibles, de recourir à des clauses de sauvegarde, la cnDAspe, avec l’appui scientifique du CPP, invitera l’ensemble des acteurs concernés à engager une réflexion pouvant déboucher sur un document méthodologique détaillé comportant les conditions minimales d’ordre scientifique pouvant justifier le recours au principe de précaution, notamment pour les substances et mélanges dangereux en cause dans le présent dossier.
  • La cnDAspe reste attentive aux développements de ce dossier.

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